La médecine intégrative suscite de nombreux débats. Entre enthousiasme et critiques, elle interpelle sur la place des pratiques non conventionnelles dans notre système de soins. Cet article propose de clarifier ce qu’est réellement la médecine intégrative, de répondre aux critiques, et d’exposer pourquoi une approche raisonnée est essentielle pour répondre aux défis de santé actuels.
Comprendre la Médecine Intégrative
“La Médecine Intégrative est une sur-spécialité médicale internationale qui réoriente l’approche médicale autour de la personne, et non simplement de la maladie.
Elle répond aux besoins des patients, des soignants, de la société et de la planète en étant :
- Préventive: elle préconise une hygiène de vie saine et recommande des outils efficaces pour y parvenir
- Personnalisée: elle prend en compte le patient dans son individualité ; elle accorde beaucoup d’importance à la relation docteur/patient et y consacre le temps qu’il faut
- Holistique : elle considère que les santés physique, mentale, et spirituelle sont indissociables
- Ouverte: elle reconnaît l’utilité des approches complémentaires dans des cas précis et avec un encadrement rigoureux par un médecin
- Basée sur les preuves: elle est avant tout une médecine moderne, qui se base sur les dernières avancées scientifiques pour assurer les meilleurs résultats tout en garantissant un maximum de sécurité.”[i]
La médecine intégrative vise entre autres à intégrer des approches complémentaires à la médecine conventionnelle lorsque celles-ci ont fait preuve d’efficacité. Elle ne s’oppose pas à la science, mais s’appuie sur elle pour enrichir la prise en charge globale du patient. Elle comprend que la science est une action dans le temps et que certaines pratiques aux risques minimes peuvent contribuer au bien-être et à la santé globale des patients avant d’avoir atteint un niveau de preuves rigoureux, ou sans en connaître le mécanisme d’action (comme un nombre non négligeable d’interventions conventionnelles d’ailleurs) et permet au médecin avisé de les suggérer, sans toutefois prétendre un niveau de preuve plus élevé qu’elles n’ont.
Une approche raisonnée et fondée
Loin de recycler des thérapies pseudoscientifiques, la médecine intégrative distingue clairement :
- Les approches validées scientifiquement
- Les pratiques non prouvées, qui ne doivent pas être intégrées sans indications de bénéfices potentiels et de risques minimes et sans évaluation rigoureuse.
À l’Institut Rafaël, nos soins sont offerts gratuitement et évalués. Nous souhaitons contribuer au besoin d’approfondir la recherche sur ces pratiques, dans la transparence et la bienveillance de l’esprit scientifique, innovant par définition.
Un cadre international reconnu
Plusieurs institutions internationales ont établi des recommandations claires pour intégrer certaines pratiques complémentaires dans le traitement de maladies comme le cancer. Ces recommandations soulignent l’utilité de la médecine intégrative dans la gestion de la douleur, de l’anxiété, de la fatigue, et d’autres symptômes, tout en respectant la sécurité et les traitements conventionnels.
Pourquoi Intégrer les Médecines Complémentaires dans le Système de Soins ?
Répondre aux besoins des patients
Le développement des pratiques complémentaires répond à une demande croissante des patients, souvent insatisfaits des limites de la médecine conventionnelle, notamment pour la gestion des maladies chroniques ou du bien-être global.
Encadrer plutôt qu’ignorer
Refuser d’intégrer ces pratiques revient à laisser un vide exploité par des praticiens non formés, parfois dangereux pour les patients. En revanche, des exemples comme celui de la Suisse montrent qu’un cadre réglementé assure sécurité et efficacité, et limite les dérives.
Une évolution nécessaire
Historiquement, la médecine a évolué pour répondre aux attentes sociétales et aux avancées scientifiques. Aujourd’hui, intégrer les dimensions psychologiques, sociales et culturelles dans la prise en charge est essentiel, en particulier pour les maladies chroniques.
Répondre aux Critiques
Les craintes de perte de chance
Certains reprochent à la médecine intégrative de promouvoir des thérapies alternatives et dangereuses, notamment par perte de chance d’un traitement conventionnel. Cependant, par définition, la médecine intégrative comprend avant tout la médecine conventionnelle. En effet, il est crucial de distinguer les usages alternatifs des usages complémentaires. L’intégration ne signifie pas remplacer les traitements conventionnels, mais les enrichir de manière réfléchie et encadrée. De plus, connaissant l’impact sur la santé publique de la non-prise de traitements prescrits, la médecine intégrative permet au patient, en relation thérapeutique de confiance avec le médecin intégratif, et dont les effets secondaires sont palliés par des approches complémentaires, une meilleure adhésion aux traitements conventionnels.
Vaccination et médecine intégrative
Contrairement à certaines idées reçues, les études récentes montrent que l’usage raisonné des thérapies complémentaires n’est pas corrélé à une baisse de l’adhésion vaccinale. Bien au contraire, un accompagnement intégratif peut renforcer la confiance des patients dans les recommandations médicales.
Renforcer la Formation des Soignants
Pour intégrer efficacement ces pratiques, il est impératif de former les professionnels de santé. Aujourd’hui, la formation médicale en France reste insuffisante sur des dimensions essentielles comme :
- La psychologie de la santé
- Les approches complémentaires validées
- La posture centrée sur le patient
En France, cette vision se structure grâce au travail du Collège Universitaire de Médecines Intégratives et Complémentaires (CUMIC), qui réunit médecins, pharmaciens, sages-femmes, psychologues, et d’autres professionnels de santé. Pour garantir la qualité et l’efficacité de ces thérapies, le CUMIC milite pour un enseignement structuré dans les cursus universitaires. Cela inclut la création de diplômes universitaires, la formation des praticiens, et l’établissement de critères rigoureux pour évaluer les bénéfices et les risques de chaque pratique.
Pour en savoir plus sur les recommandations et les travaux du CUMIC, visitez leur site officiel : CUMIC.
Conclusion
La médecine intégrative s’inscrit dans une démarche de réduction des risques et d’amélioration de la prise en charge globale du patient. Inspirée par des modèles internationaux et soutenue par une demande croissante des citoyens français, elle mérite une place structurée dans le paysage médical national.
La médecine intégrative n’est pas une menace pour la médecine conventionnelle, mais une opportunité d’enrichir le système de soins. En adoptant une approche raisonnée et encadrée, elle répond à des attentes sociétales tout en respectant les exigences scientifiques. L’exemple suisse et les recommandations internationales montrent qu’il est possible d’intégrer ces pratiques tout en garantissant la sécurité et l’efficacité des soins.
Il est temps de dépasser les clivages et de reconnaître la médecine intégrative comme une approche moderne et scientifique, capable de répondre aux défis de santé de demain.
Références
- Gleize, J, Qu’est-ce que lq médecine intégrative ? Site web de la Société Française d’Oncologie Intégrative : www.SFOI.fr
- Mao JJ, Greenlee H, Bao T, Ismaila N, Bruera E. Integrative Medicine for Pain Management in Oncology: Society for Integrative Oncology-ASCO Guideline Summary and Q&A. JCO Oncol Pract 2023;19:45–8.
- Carlson LE, Ismaila N, Addington EL, Asher GN, Atreya C, Balneaves LG, et al. Integrative Oncology Care of Symptoms of Anxiety and Depression in Adults With Cancer: Society for Integrative Oncology-ASCO Guideline. J Clin Oncol 2023;41:4562–
- Lyman GH, Greenlee H, Bohlke K, Bao T, DeMichele AM, Deng GE, et al. Integrative Therapies During and After Breast Cancer Treatment: ASCO Endorsement of the SIO Clinical Practice Guideline. JCO 2018;36:2647–
- Bower JE, Lacchetti C, Alici Y, Barton DL, Bruner D, Canin BE, et al. Management of Fatigue in Adult Survivors of Cancer: ASCO-Society for Integrative Oncology Guideline Update. J Clin Oncol 2024;42:2456–
- Ward JK, Gauna F, Deml MJ, MacKendrick N, Peretti-Watel P. Diversity of attitudes towards complementary and alternative medicine (CAM) and vaccines: A representative cross-sectional study in France. Soc Sci Med 2023;328:115952.
Tribune dans Le Monde : Il est temps d’accorder une place raisonnée aux médecines alternatives dans le système de soins, 2022.
