Les médicaments Biosimilaires en France

Docteur Alain TOLEDANO
Alain Toledano Lancement cycle de conférence assemblée nationale

Voltaire disait « Les médecins administrent des médicaments dont ils savent très peu, à des malades dont ils savent moins, pour guérir des maladies dont ils ne savent rien »

Même si cette pensée Voltairienne nous inspire l’humilité, chacun mesurera l’écart avec les réflexions aussi scientifiques que rigoureuses sur le sujet des biosimilaires.

Origine des médicaments Biosimilaires

En 2018, 11 des 15 médicaments les plus vendus au monde étaient des médicaments biologiques. Le premier d’entre eux, commercialisé au début des années 80, était l’insuline humaine. Ces médicaments onéreux représentent une part importante des dépenses de l’Assurance maladie.

On assiste ces dernières années à la mise sur le marché de nombreux médicaments « similaires » à des médicaments biologiques de référence, appelés biosimilaires (BS).

Ces BS ont été autorisés dans l’Union Européenne en 2006, au Japon en 2009, aux états unis en 2015. Entre 2007 et 2020, 33 biosimilaires en Oncologie ont été approuvés par l’agence médicale européenne (EMA), et 16 par l’agence américaine (FDA).

Ce sont des molécules complexes, en ce qui concerne la taille (100 à 1000 fois plus grand que les molécules chimiques) ainsi que la structure. Prenons pour illustration l’écart entre les molécules chimiques de petite taille (entre 150 et 500 Da), comme l’aspirine, comparativement aux médicaments biologiques de macromolécules complexes (150 000 Da), comme les biosimilaires. Cela équivaut à imager le saut entre la fabrication d’un vélo à la production d’un avion.

Il existe deux sources de production biologique : les organismes vivants procaryotes et eucaryotes, à l’origine de populations moléculaires hétérogènes : on parle de « micro-hétérogénéité ». Un médicament biosimilaire ne peut être une copie stricte du médicament biologique de référence, mais présente une forte de similarité́ avec celui-ci, une biosimilarité.

Différences entre médicaments génériques et biosimilaires

Les génériques diffèrent des biosimilaires, qui diffèrent eux-mêmes des princeps ou des médicaments issus des plantes, tous sont régulés par l’ANSM. En général, les étapes de l’autorisation d’utilisation des médicaments sont issues d’un processus long et coûteux. Pour illustration, la durée de développement et le coût de développement d’un médicament chimique ou biologique de référence est en moyenne de 8 à 10 ans, et 600 à 800 M€ ; concernant le générique chimique, elle est de 1 à 3 ans et 1 à 3 M€ ; alors que pour le similaire biologique, elle est de 5 à 6 ans, et de 100 à 300 M€.

Le « choc biosimilaire » est très différent de la « révolution générique », car ils diffèrent sur deux points essentiels : d’abord, les contraintes de développement et d’enregistrement des BS, et la complexité des processus de production, génèrent des différentiels de prix très inférieurs à ce que l’on observe pour les génériques. Ensuite, la comparabilité avec le médicament original n’est pas la même selon que l’on a affaire à un générique ou à un BS, dont le processus industriel de fabrication fait intervenir des organismes vivants.

Les BS offrent une plus grande sécurité́ d’approvisionnement en augmentant le nombre d’alternatives thérapeutiques disponibles. D’autre part, ils permettent de stimuler la concurrence et de conduire à une baisse de prix du médicament biologique de référence. C’est un levier d’économie potentiel pour le système de soin.

L’essor des médicaments biosimilaires

En France, en 2018, 26 médicaments biosimilaires étaient commercialisés, couvrant 8 aires thérapeutiques. Aujourd’hui, les médicaments biologiques sont retrouvés dans 16 aires thérapeutiques majeures dont principalement :

  • l’infectiologie,
  • l’oncologie/hématologie,
  • l’hémostase,
  • la rhumatologie,
  • la diabétologie
  • et l’endocrinologie.

Il s’agit de traitements très ciblés permettant de traiter des pathologies à fort besoin médical non satisfait, dans des pathologies souvent lourdes et constituent un axe de développement majeur pour l’industrie. L’ANSM estime que plus d’un tiers des produits innovants en développement serait issu de la biotechnologie. En 2024 les médicaments biologiques représenteront 52% du top 100 des médicaments les plus vendus, avec 31% des parts de marché.

Le marché́ des médicaments biologiques dans les 10 pays mondiaux majeurs est évalué à près de 400 Mds€ en 2022. Il est également estimé que 80 % de la dépense actuelle sera « biosimilarisable » en 2027 ceci étant due à l’expiration de brevets.

En Europe, le marché des médicaments biologiques est en pleine expansion avec 11,3% de croissance annuelle (deux fois plus que pour le marché total des médicaments en 2022). L’arrivée sur le marché des médicaments biosimilaires (BS) a permis de réaliser une économie globale cumulée de 3,8 milliards d’euros depuis 2012 en France.

L’industrie du médicament, recherche et innovation

Les industries du médicament constituent un secteur stratégique dont le poids économique est considérable en France et dont le dynamisme à l’exportation est particulièrement précieux. Elles se caractérisent par une forte capacité d’innovation continue et comptent dans leurs rangs des champions nationaux d’envergure mondiale, des acteurs européens et internationaux installés en France. Ces industriels de la santé en France ont pour caractéristique d’être positionnés sur l’ensemble des activités de la chaîne de valeur : recherche, développement, pré-industrialisation, accès au marché́, production, distribution. C’est un avantage qu’il convient de préserver et de renforcer. Le médicament est également un baromètre de l’état de la recherche.

La France jouit d’un écosystème de recherche et d’innovation scientifique, académique et industriel particulièrement riche. Malgré cela, la situation française est aussi marquée par la dégradation qui se traduit aussi bien par une perte de capacités industrielles (-37% de production pharmaceutique entre 2004 et 2014 faisant passer la France au 4ème rang européen derrière la Suisse, l’Allemagne et l’Italie), le décrochage en matière d’essais cliniques réalisés sur le territoire, la faiblesse des investissements privés dans les entreprises en fin de phase d’amorçage, ainsi que par le départ de talents pourtant formés en France vers des pays plus prometteurs.

Le secteur des produits de santé et des médicaments emploie plus de 340 000 personnes, dont près de 10% dans la recherche et le développement. Avec un chiffre d’affaires global de plus de 75 milliards d’euros, l’ensemble du secteur des médicaments et des produits de santé est donc un acteur majeur de l’économie nationale, à considérer. L’arrivée des BS sur le marché́ français est un levier potentiel d’économie pour le système de soin.

État de la prescription des biosimilaires en France

Il existe encore une disparité dans la prescription de biosimilaires en première intention. Si certains BS sont largement instaurés chez des patients naïfs, la prescription du médicament de référence reste majoritaire. Cette disparité est aussi liée aux spécificités des pathologies prises en charge par les BS : «il est plus difficile de proposer une nouvelle spécialité BS à un petit groupe de malades chroniques qui sont soignés avec le même traitement depuis une longue période ».

A l’inverse, pour traiter des épisodes ponctuels d’une maladie, à l’image du filgrastim dans la prise en charge de neutropénies liées aux chimiothérapies, le médecin dispose d’une marge de manœuvre plus large, avec un flux de nouveaux patients plus fréquent et donc une prescription de BS facilitée

Liste des médicaments biosimilaires

La liste de référence des médicaments biosimilaires, présentée par dénomination commune de la substance, regroupe les médicaments inclus dans chaque groupe biologique similaire conformément à l’article L. 5121-1. Pour chaque médicament, sont précisés : le nom, le dosage, la forme pharmaceutique, le titulaire de l’AMM, l’entreprise exploitante, les indications thérapeutiques, la posologie et, le cas échéant, les excipients à effets notoires. Vous pouvez consulter la liste complète ici.

Depuis le 14 avril 2022, le pharmacien est autorisé à substituer deux médicaments BS aux médicaments biologiques de référence. Cette possibilité de dispensation, bien que limitée, ouvre un nouveau domaine d’action à l’officine

De façon plus large, Réfléchir l’outil médicamenteux en Médecine nous est indispensable.

Les médicaments sont des produits pharmaceutiques industriels, pleins de sens symboliques. Ils font partie de l’intimité de chacun. Ces objets terriblement efficaces, puisque des centaines de millions de personnes ne doivent leur (sur) vie qu’à leur consommation, sont aussi le support d’un investissement idéologique, d’interprétations, en rapport avec la culture scientifique biomédicale qui les produit et avec les multiples sous-cultures qui les (ré) interprètent.

Aussi, ils véhiculent socialement des rapports de savoirs et de pouvoirs plus ou moins inégalitaires, légitimant l’organisation d’institutions, de systèmes et de réseaux.

La dynamique de promotion des BS à l’unisson, décloisonnant les spécialités, en se focalisant sur les intérêts communs de notre système de santé, est un engagement symbolique que nous devons réussir ensemble.

 

 

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